Chapitre
II :
Où
l'on voit B et P aux prises avec Thierry L. G. C.
Pendant
leurs jours parisiens, lors de leur glorieuse cohabitation dans un
appartement au cinquième étage d'un immeuble tranquille, P et B
furent confrontées un matin, tôt, à un problème glaçant.
B
était en train de se servir son troisième thé en regardant par la
fenêtre, P entonnait O Sole mio
dans la salle de bain. Un cri affreux réveilla B qui sans se
l'avouer se rendormait :
“ Heeee
aaaahhhh mais euuuh aaaahhhh c'est froid, bordel de bois, merdasse,
chienlit, hurlait une voix aiguë, qu’est-ce que c’est que ça ?
” Ça, c'était P qui venait de s'asperger d'eau glacée. Elle cria
encore un peu, B essuya le thé qu'elle avait renversé.
Elle
tinrent conseil de part et d'autre de la porte de la salle de bain :
Il fut décidé de faire chauffer de l'eau dans la bouilloire pour
parer au plus pressé.
Ce
soir-là, elles se réunirent dans le couloir : Une table, deux
tabourets, des étagères fabriquées de cagettes, de briques et de
planches croulantes de livres, un poster de Corto Maltese ; cet
endroit qu’elles jugeaient accueillant leur servait de pièce
commune.
Elles
réfléchirent : Puisque la chaîne stéréo fonctionnait très bien,
puisque le seul problème visible était l'absence d'eau chaude, ça
ne pouvait être que la plomberie. Que faire ? Qui appeler ? Bien
qu'ayant des amis et relations dans des milieux très divers, aucune
ne connaissait une personne suffisamment douée en plomberie.
D'autres urgences à régler d'abord les laissèrent deux jours,
matin et soir chacune son tour, perplexe, la bouilloire d'eau chaude
dans une main, le gant de toilette dans l'autre, les yeux fixés sur
le ballon d'eau chaude qui ne voulait plus en déverser une goutte.
“ Ça
vient de là, c'est sûr ”, disait à chaque fois B en sortant de
la salle de bain.
“J'ai
bien regardé d'où partait le tuyau, ça vient de là, sans aucun
doute ”, disait P en y entrant.
La
réponse à leur problème s'annonça un soir, en lettres rouges et
bleues, sur un prospectus chiffonné au fond de la boîte aux lettres
visitée par P :
“ Problèmes
de tuyauterie nininin nin nin... etc. “
C'était
un signe miraculeux. P monta quatre à quatre les deux premiers
étages, un peu plus lentement les trois autres et trouva B qui se
tortillait exagérément en trifouillant la clef dans la serrure, des
sacs en plastique débordant de courses à ses pieds, son sac à main
à moitié renversé.
“ Panique
pas ”, dit P en ouvrant calmement la porte. Et enthousiaste, elle
annonça à B qui courait aux toilettes : “ Ça y est, j'ai un
numéro pour l'eau chaude. ” La solution, c'était :
“
Thierry et Max Dépannage
Tous dépannages, plomberie, rapidité assurée ”
Dans
le couloir on s'extasia en relisant le carton.
“
Problèmes de tuyauterie? votre chauffe-eau ne répond plus ?
Appelez sos plomberie nous avons la solution à vos soucis ”
Nouvelle
concertation sur qui appellerait. B ne s'en sentait pas la capacité
et P voulait bien mais si B restait à ses côtés :
“ Tu
comprends ça risque d'être un peu technique et j'ai peur de dire
des conneries. “
“ -Sos
plomberie à votre service bonsoir.
-
Bonjour monsieur, je... nous... c'est un chauffe-eau.
-
Oui ma p'tite dame c'est souvent le chauffe-eau, alors qu'est-ce
qu'il a ce chauffe-eau ? Électricité ? Gaz ?
-
Électricité, souffla B.
-
Euh alors ah oui électrique c'est électrique, en fait on n'a plus
d'eau chaude, voilà.
-
Électricité vous dites ? Alors c'est certainement le ballon ma
p'tite dame. “
On
fixa un rendez-vous. Grâce à SOS plomberie, P et B se couchèrent
ce soir-là, rêvant d'une douche chaude.
P
ayant téléphoné, B proposa de rester le lendemain pour ouvrir la
porte aux sauveurs. Elle pensait les attendre quand même un moment
et avait préparé une théière de thé Tuo Cha. Le thé Tuo Cha
était une récente découverte au 75 ter rue des Lilas. P et B
étaient des buveuses de thé. Elles étaient aussi toutes les deux
parfois insomniaques. Une relation de travail de P ne buvait que du
thé Tuo Cha car il n'y a dedans quasiment aucune théine. B en avait
alors acheté une grosse boîte. Pour essayer. Or, le thé Tuo Cha
est aussi très très diurétique. Mais on y reviendra.
B
finit donc par accueillir un dénommé Thierry de deux mètres de
haut, la caisse à outils comme un réticule au bout du bras :
“ -
Alors c'est où ?
-
Ben, dans la salle de bains, je vais vous montrer.
-
Y'en a des livres ici.
-
Ah oui oui.
-
Et vous les mettez pas sur des étagères ?
-
Ben euh on n'a plus de place, vous voulez du thé ? “
Il
regarda d'un air peu inspiré les tasses que B s'empressait de
remplir.
Ils
entrèrent dans la salle d'eau. B se dépêcha de pousser du bout du
pied sous le placard un soutien-gorge bleu à fleurs noires.
“ -
Voilà le ballon.
-
Oui, c'est un 250 litres. Vous habitez toute seule ?
-
Heu non, pourquoi ?
-
Non paske 250 litres toute seule, c'est quand même beaucoup, dit
Thierry avec un sourire entendu. “
B
n'entendit pas grand-chose toute occupée à fermer le tiroir des
chaussettes qui coinçait.
Le
dénommé Thierry scruta le ballon sec, tapota sur les tuyaux qui en
sortaient, demanda un escabeau, sortit une grosse clef de sa toute
petite trousse à outils, demanda une bassine et un chiffon, étala
quelques boulons, s'absorba dans une étude comparative poussée de
la taille des susdits, demanda s'il n'y aurait pas un joint
d'étanchéité dans la maison, parut perplexe.
“ Vous
voulez du thé ? “ demanda B avant d’aller s’asseoir dans le
couloir et se servir sa cinquième tasse de Tuo Cha.
Elle
allait s'attaquer à la tasse encore pleine du dénommé Thierry et à
la fin de Parle-moi comme la pluie et
laisse-moi écouter, lorsque le géant
se posa en face de la table, les mains dans les poches :
“ -
Il est mort ce ballon.
-
Vous voulez du thé ? demanda B.
-
Venez voir, répondit le dénommé Thierry.”
Elle
le suivit dans la salle de bain, Parle-moi
comme la pluie et laisse-moi écouter
et une tasse de Tuo Cha à la main.
B
ne comprenait pas les explications pourtant abondantes et détaillées
du dénommé Thierry. Il se lança dans un monologue. B se raccrocha
à sa tasse de Tuo Cha et rêva à son livre. Un quart d’heure plus
tard, le dénommé Thierry avait dispersé quasiment la totalité de
sa petite boîte à outils dans la salle de bains et B n'en pouvait
plus de ne servir à rien, à part répondre par des ” Ben oui
” aux considérations météorologiques du plombier qui commençait
à suer. La porte étant fermée, l'odeur devenait suffocante. De
plus, B regrettait d'avoir abusé du thé Tuo Cha puisque le W-C se
trouvait dans la salle de bains.
Elle
décida d'improviser pour aller réfléchir à ce problème dans une
pièce éloignée, ses dandinements commençant à être perceptibles
:
“ -
Oh je crois que j'ai entendu frapper, dit-elle timidement.
-
Ben vous avez pas de sonnette ?
-
Non enfin si, mais ça doit être la vieille dame, elle est veuve
vous comprenez et elle a besoin parfois de mes services.
B
s'agaçait.
-
Ah ? Elle vous paye au moins ?
-
Oh ben non, on peut se rendre service quand même et puis son mari a
une bonne situation.
B
devait lutter pour ne pas s'accroupir de désespoir.
-
Ben elle est pas veuve ?
-
Comment ça ?
-
Ben vous m'avez dit qu'elle était veuve. Elle est pas veuve ?
-
Ah bon ? J'ai dit ça moi ? Je me suis trompée, c'est l'autre
voisine. De toutes façons j'y vais hein ? Si vous avez besoin je
suis à côté hein ? “
B
claqua la porte plus fort qu'elle ne voulut et courut à la cuisine
en dansant et s'asseyant sur tous les tabourets qu'elle rencontrait.
Que
faire ?
Le
dénommé Thierry ayant cessé ses commentaires sur le vaste monde,
l'appartement parut à B d'un silence effrayant. Un peu honteuse,
elle entrouvrit la porte et s’adressa à l'escalier, tout en
utilisant ce qu'elle sentait être ses dernières capacités de
concentration à prier pour qu'aucun, aucun voisin ne s'annonce. Bien
qu'elle n'ait depuis fort longtemps plus vraiment peur du ridicule,
être surprise en train de se tordre devant la porte en tirant sur
son pantalon et en s'adressant aimablement à l'escalier lui
apparaissait à cet instant-là comme un danger face auquel elle se
sentait démunie. Elle articula bien fort ” Au revoir madame ”
et re-claqua la porte littéralement couchée sur le sol.
Que
faire ? Sonner chez un voisin ? L'évier ? La fenêtre ? C'était
impossible. Une pudeur monumentale l'en empêchait.
Au
comble du désespoir, elle prit un seau sous l'évier et la mort dans
l'âme, courut s'enfermer dans le placard.
Ce
fut un moment terrible.
Seule
avec le seau, au milieu des robes suspendues, l'oreille aux aguets,
elle tenta de refermer la porte avec délicatesse et discrétion et
se laissa tomber à genoux, tirant sur son pantalon avec des torsions
qui auraient pu passer pour une agonie.
Elle
eut deux secondes d'effroi :
Entre
l'idée que sa vessie pouvait à chaque seconde décider seule de
mettre fin à ce calvaire, et l'image d'elle-même installée cul-nu
sur son propre seau de ménage dans le placard de sa propre maison,
elle hésita comme une condamnée entre la chaise électrique et la
pendaison. Enfin assise sur le seau, elle se mit à siffloter
gaiement en agitant frénétiquement les cintres à portée de main,
tousser et racler du pied.
Parce
que le seau était en métal.
Parce
que si ça se trouve, tout l'immeuble allait entendre.
Parce
que l'idée que depuis la salle de bains, le dénommé Thierry qui
avait coupé l'eau, put saisir le bruit de cataracte de son activité
actuelle, on pouvait appeler ça la cerise sur le gâteau.
L'intolérable pouvait survenir à n'importe quel moment : Le
plombier suant ouvrant la porte du placard par exemple, en lui disant
que, finalement, il prendrait bien une tasse de thé ou bien lui
affirmant que le mois d'août serait pluvieux.
A
quoi rêvait B en refermant le placard ?
A
une amnésie. Une soudaine amnésie qui la conduirait à une calme
chambre d'hôpital, loin des soucis quotidiens, des seaux de ménage
plein de pipi planqués dans les gardes robes et des plombiers suant
passionnés de météo et allergiques au thé.
Histoire
de renouer avec une certaine réalité, B entrouvrit la porte de la
salle de bains. Le dénommé Thierry armé de pinces rouges et grises
avait entrepris de démonter le ballon avec des ahans à faire rougir
une courtisane. Sa sudation n'en était que plus abondante.
B
referma la porte et attendit. Bien qu'ayant très soif elle ne se
resservit pas.
Elle
avait le regard perdu dans les géraniums posés sur un balcon proche
lorsque la porte de la salle de bains s'ouvrit. Le dénommé Thierry
apparut, le ballon de 250 litres posé sur ses gigantesques
avant-bras.
“ -
Il est mort, c'est bien ce que je disais.
-
Oui.
-
Ben faut l'changer.
-
Ah.
-
J'vais r'venir demain.
-
Bien.
-
Dix heures ça vous va ?
-
Super.
-
A demain. “
Le
plombier déposa l'objet inutilisable dans le couloir et s'en fut
d'un pas pesant jusqu'à l'entrée. B frissonna lorsqu'il passa
devant la porte du placard interdit.
“-
Alors, à demain, dit le plombier en se retournant et en clignant des
yeux.
-
Super.
-
Je serai à l'heure.
-
Oui d'accord c'est super. “
B
referma la porte avec soulagement et courut effacer toute trace du
pénible moment.
Au
cours de la soirée qu'elles passèrent en compagnie du ballon mort,
laquelle était une soirée poésie et consistait à se lire les
poèmes qu'elles préféraient en buvant du Charmes-chambertin avec
un bouquet de marguerites sur la table, B ne relata pas l'incident du
placard à sa meilleure amie.
Le
lendemain, ce fût P qui ouvrit la porte, décidée à ne pas se
laisser abattre par la météomania de l'arrivant. Elle reconnut à
l'odeur la description du dénommé Thierry.
“ -
Bonjour vous êtes le plombier.
-
Ah ! C'est pas la même. J’ m'appelle Thierry.
-
La même quoi ?
-
Euh ben la même qu'hier.
-
Ben non.
-
Vous êtes la voisine ?
-
Non je suis sa compaheu colocataire.
-
Ah d'accord. “
Petit
coup d'œil circulaire sur la silhouette de P, qu'elle saisit au
passage et renvoya avec des yeux féroces. Puis elle salua une jeune
femme qui montait allègrement l'escalier en survêtement.
“ -C'est
la veuve ? demanda Thierry, al’ a l'air joyeuse. “
Et
il s'esclaffa. Tout à fait interloquée, P se rua sur la théière
de thé Tuo Cha pour ne pas lever les yeux au ciel.
“ -
Vous voulez du thé ?
-
J’ vais devoir monter l’ ballon, il vaudrait p’t-être mieux
qu’ j'appelle mon collègue.
-
Je peux peut-être vous aider, s'empressa de proposer P qui ne
souhaitait pas se voir prolonger ce moment convivial.
-
Ben faut voir, répondit le plombier en la soupesant du regard.
P
cogna sa tasse sur la table et resserra ses lacets de chaussures.
-
Bon et bien allons-y. “
Et
sans attendre de réponse, elle sortit.
Ils
allaient s'engager dans l'escalier sur une remarque très à propos
du dénommé Thierry concernant l'amoncellement de nuages gris alors
que Météo France avait hier soir parlé de soleil, lorsque P
demanda :
“ -
Mais heu, le ballon mort ?
-
Ah ben il est mort. On peut plus rien en faire.
-
Oui merci, mais il ne va pas rester dans le couloir ?
-
Ah ben faudra l’ descendre.
-
Heu oui merci. Alors on pourrait le faire maintenant ?
-
Ah ben si a veut. “
Un
peu plus tard, P était à moitié coincée contre le mur de
l'escalier, jurant et soutenant un bout du ballon neuf, pendant que
suant et palabrant, le dénommé Thierry soutenait l'autre.
Il
fallut ensuite aider le dénommé Thierry à poser le ballon neuf.
Lorsqu'elle se retrouva en équilibre sur le bord de la baignoire,
portant à bout de bras le ballon pendant que le dénommé Thierry
était parti loin, très loin, poursuivant les cumulus et les
stratus, tout en fixant le dit ballon, P regretta vraiment d'avoir
proposé son aide.
“ -
Et puis qu'est-ce qu'elle boit comme thé vot' copine.
-
Oui c'est sûr.
-
C'est pas un peu d'la drogue ?
-
Oui c'est sûr.
-
Ah et vot' pov' voisine quand même, ça doit pas êt' facile tous
les jours.
-
Oui c'est sûr. “
Du
moment qu'elle avait l'impression de tout faire pour accélérer le
processus, ces opérations ne coûtaient à P que l'effort musculaire
qu'elles requéraient. Mentalement, elle s'absenta tout à fait et se
chanta tout le répertoire de Zizi Jeanmaire qui lui revenait, en
laissant défiler la bande-son parasite de radio-machin que semblait
avoir avalée le dénommé Thierry.
Cependant
l'odeur était gênante, ainsi que les efforts du plombier pour
étaler ses outils dans toute la salle de bains. P s'était en fait
tellement absentée qu'elle sursauta en s'apercevant qu'elle se
croyait maintenant nue sous une douche chaude et qu'elle avait
entonné La brave fille à
haute voix en fixant d'un air joyeux les gouttes de sueur qui, floc
floc, faisaient une petite flaque sur le carrelage bleu pétrole. Un
choc métallique suivi d'un ahan la réveilla. Le dénommé Thierry
avait délibérément laissé tomber une grosse clef. Il tentait
maintenant de visser ce qui ressemblait à un bouchon de bidon
d'huile dans le mur. Puis il annonça d'un air ravi, en s'essuyant
avec la petite serviette mauve de P : “Pfffooouu et ben ouala”.
L'opération
terminée, P se rua dans le couloir pour se désaltérer et s'aérer.
Elle
sirotait sa tasse de thé Tuo Cha lorsque le dénommé Thierry se
planta devant elle.
“-
Bonben oula hein.
-
Ben oui.
-
Ah ça pas été facile.
-
Ben non.
-
Sans homme comme ça vous arrivez à vous en sortir ?
P
sentit le rouge lui monter aux joues.
-
Passke c'est bien joli les livres et tout ça mais dès qu' ça pèt'
quéqu' part, c'est quand bien d'avoir un homme non ?
P
bouillait.
-
Et pis y'a d'aut'z avantages évidemment, continuait à s'enflammer
Thierry en clignant des yeux. ”
Cette
fois là P ne bouillait plus, elle eut même envie de rire. Cette
envie dura moins d'une seconde puisque le dénommé Thierry venait de
poser un regard de personnage de Tex Avery sur le très léger
décolleté de son pull en v.
“ -
Eh bien au revoir, dit-elle en ouvrant grand la porte d'un geste plus
enthousiaste qu'elle ne l'avait souhaité.
-
Bon ben alors al’ me rappelle hein si y'a le moindre problème. Al’
hésite pas, elle ou la copine là, celle d'hier, faudra d'mander
Thierry, hein, faut préciser Thierry. “
Elle
avait tellement, tellement envie qu'il s'en aille qu'elle oublia de
lui demander :
1.
Ce qui allait se passer maintenant.
2.
Combien cela allait coûter.
3.
Avait-il pensé à remettre l'eau en route.
La
journée de P fût vraiment gâchée lorsqu'elle se mit à courir en
poursuivant la voiture et en hurlant “ Thierry ” dans
la petite rue en pente pleine de monde.
Il
y eut évidemment des complications puisque le soir même, provenant
de la salle de bains, on entendit ceci :
“ Mais
euuuh aaaahhhh c'est froid, bordel de bois, merdasse, chienlit. ”
Le
dénommé Thierry revint donc deux fois et, non sans plaisir,
continua à disséminer ses outils dans toute la pièce tout en
dissertant sur le réchauffement climatique.
La
troisième fois, quatre semaines après, le technicien du service
après vente du fournisseur annonça à P et B, qui n'avait même
plus la force d'acquiescer :
“ Poser
trois fois de suite la même pièce à l'envers, c'est un escroc
votre plombier, faites vous rembourser. ”
Têtues
B et P tinrent bon, accueillant maintenant ensemble le plombier
arnaqueur.
Lors
de ce qui semblait être enfin sa dernière intervention, le dénommé
Thierry, papillonnant et suant au milieu des deux jeunes femmes leur
confia d'un ton attristé :
“-
Bon ben cette fois là c'est bon. J'devrais plus avoir à r'venir.
-
Oh !
-
Ah nonon là, c'est bon, y'a pus d'problèm'. Bon ben c'est dommage,
on va pus s'revoir.
-
Ben non.
-
Bon ben si vous trouvez un outil qu'j'aurais oublié, hein, on sait
jamais, vous appelez, et vous d'mandez Thierry, hein, vous vous
rapell'rez... “
Elles
le regardaient cligner des yeux, incrédules.
Le
soir même, B et P trouvèrent une énorme clef posée sur la petite
serviette mauve.