vendredi 30 août 2013

ET SI ... 8




La nuit est en train de tomber. Vous buvez l'apéro au bar en compagnie de deux bons piliers et d'un vieux pote célibataire qui vient de vider son quatrième kir. Il vous invite à goûter son lapin à la moutarde, ça tombe bien : le frigo est vide, le poêle n'a pas chauffé de la journée.
Le lapin est délicieux mais le vieux pote est plus qu'éméché. Après vous avoir enlevé une poussière au coin des lèvres, examiné l'intérieur de la main car vous avez comme une petite cale là, qu'est-ce que c'est ? et frôlé le dos en attrapant la bouteille de gnôle, il vous lance un « Mais toi aussi tu dois te sentir seule quand même », subtil. « Euh... mais moi j'aime bien » dites-vous. Vous regardez par la fenêtre.
Et si ...
Et si vous vous leviez et hurliez : « Là maintenant, je me sens trrrrés trrrrés seule, Mr Grossabots. Et si t'allais te vider les couilles une bonne fois pour toutes au lieu de me pomper l'air, j'en peux plus de me sentir comme un bout de gras suspendu au-dessus d'un chien affamé chaque fois que tu bois. Bon. J'y vais. Bonne branlette. »
Hein ?

Non. Ce serait mal.

mercredi 21 août 2013

ET SI ... 7


Vous déballez votre panier sur le tapis roulant de la caisse du riant petit supermarché : tube de dentifrice, oignons, carottes, bouquet garni, tendrons de veau, boîte de préservatifs, bouteille de vin blanc. La caissière vous sourit sous son brushing à mèches roses :
Oh, ça sent bon le petit plat pour son mari ça. J’en connais un qui va se régaler avec ça. C’est gentil ça. “, avant que d’empoigner son téléphone et de brailler dans tout le supermarché : “ Nadine crrrry a un articrrrr des capoteccrr ccri passpa. ”
Vous regardez vos pieds.
Et si ...
Et si vous saisissiez le morceau de bidoche et que vous lui claquiez sur le brushing en hurlant :
Grosse abrutie occupe-toi de ton cul. Qui te dis que je suis mariée, que je cuisine et que je vais régaler quelqu’un ? Va raser ce que tu as sur la tête et ferme ta grande gueule. “
Hein ?

Non. Ça serait mal.

jeudi 15 août 2013

ET SI ... 6

Le soleil caresse les toits bruns de la petite ville. Vous attendez devant la charmante école maternelle aux fenêtres fleuries qu’il soit l’heure pour vous d’emmener un tas de bambins à la cantine.
Une mère, poussette aux poings, vous apostrophe :


I fait beau.
- Oui. “
Dans le véhicule, engoncé dans des couvertures bleues ( c’est un garçon ), un enfant éternue.
Hihihi. Le gros dégueulasse il en a mis partout. A la télé i disaient qu’on était parti pour un bel été.
- Oui.
- Au Marvin on lui a acheté une PS2 et pis un flingue à billes c’était son anniversaire lundi. Vous voyez qui c’est le Marvin ?
- Oui. “
Marvin a cinq ans et vous voyez parfaitement qui c’est. C’est le petit garçon qui vous a dit une fois : “ Les bonnes femmes, ça casse les couilles. “, ce qui a fait beaucoup rire sa maman : “Hihihi”.


Vous regardez vos pieds.
Et si ...
Et si vous arrachiez le téléphone portable de la main de cette bonne femme et que vous le claquiez sur le mur de la maternelle fleurie en gueulant :


Ta gueule connasse, je ne suis pas ta copine. T’es con comme un boulon. Toi et ta moitié alcoolique, vous êtes en train de rendre votre môme encore plus con que vous, ce qui est peu dire.”


Hein ?

Non. Ça serait mal.

jeudi 8 août 2013

"ET SI ..." 5


De bonne heure le matin, vous empruntez le petit chemin gravillonné menant à la crèche. En effet, on vous a confié une petite fille à y déposer. Vous la tenez d’une main, tandis que de l’autre vous maintenez tant bien que mal le siège réhausseur, le sac à rechange, un paquet de couches, les bottes s’il pleut, le chapeau s’il fait beau, le gilet s’il fait froid, le petit sac à goûter et L’idiot de Dostoïevsky qu’une copine vient de vous rendre sur le parking. Lorsque surgit face à vous une femme armée d’une poussette avec quelquun dedans. La femme greffée d’une poussette vous regarde, impassible. Vous êtes gênée et encombrée. Que faire ? Nul code, celui de la courtoisie ou celui de la route, n’est clair là-dessus. Qui passe ? Qui s’efface ? La femme aux défenses poussettéiformes ne semble pas se poser ces questions, ni aucune autre d’ailleurs, certaine de son bon droit et de sa supériorité ( vous pesez 50 kilos, vous n’avez pas de poussette, vous n’avez pas d’enfant, celui au bout de votre bras n’étant qu’un emprunt ), elle redémarre à fond vous laissant juste le temps de vous écrouler dans une jardinière en béton garnie d’œillets des poètes. Vous regardez au loin.
Et si ...
Et si vous vous lanciez à sa poursuite et que vous la frappiez à coups de réhausseur et d’Idiot de Dostoïevsky en lui gueulant : “ Connasse, tu penses peut-être que faire des courses de poussettes avec tes copines te donne le droit de m’humilier dans les œillets ? “ tout ça sous les hurlements de terreur des enfants.
Hein ?

Non. Ça serait mal.

jeudi 1 août 2013

"ET SI ..." 4


Il fait beau. Vous admirez par la fenêtre les premières ronces qui pointent. On frappe à la porte. Votre ex est là avec des fleurs, les joues légèrement pourpres. Après une hésitation - ce n'est pas n'importe quel ex, il vous a trompé vous ne saurez jamais combien de fois, jusque dans votre propre lit - vous lui offrez un café, et mettez les fleurs dans l'eau. La discussion est charmante. Il vous invite à dîner, vous hésitez. Vous savez ce qu'il a en tête. Ce type est tout simplement un « orgasm addict ».
Vous regardez l'eau dans le vase.
Et si ...
Et si vous acceptiez ? Vous mettriez la robe bleue moulante et vos grandes bottes. Vous l'inviteriez à boire un dernier verre, il vous passerait le bras autour de la taille. Après un baiser torride, commencerait l'effeuillage. Au moment où il aurait juste baissé son pantalon, vous vous rhabilleriez en hâte et, froidement, diriez « Excuse-moi, je suis vraiment désolée, ça ne va pas être possible. »
Hein ?

Non. Ce serait mal.